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Texte et illustration de Juliane Choquette-Lelarge, collaboratrice spéciale
Portraits d’entrepreneur.e.s startup: de l’idée aux premières étapes de commercialisation, apprenez-en plus sur le parcours de ces entrepreneur.e.s exceptionnel.le.s ainsi que sur les acteurs de l’accompagnement québécois qui les ont aidés à pousser l’audace encore plus loin. Aujourd’hui, découvrez l’histoire d’Autonom et de son fondateur, Hugues Marceau.
Un éclair déchire le ciel.
Une seconde, deux secondes, trois secondes… Tonnerre. Gros tonnerre. Ok, l’orage est proche.
Tu secoues ton parapluie, considères tes pieds trempés avec découragement et après un dernier regard vers les trombes d’eau qui inondent le trottoir, tu t’engouffres dans la bâtisse. Entre les cubicules règne une drôle d’agitation. On regarde le ciel noir en se lançant des regards un peu inquiets: ça ne va pas tarder à arriver. Comme à chaque tempête, vous le savez, ça s’en vient. Tu t’assoies à ton bureau, la tasse de café à la main, et ça ne prend pas une demi-heure.
« Ok on a une panne dans le secteur nord-est! »
Bon. C’est parti.
Quelque part, sur des milliers de kilomètres carrés, tous les cellulaires viennent de perdre le réseau, les connexions internet viennent de flancher et des milliers de jurons s’élèvent en chœur dans les airs. Tu te surprends à te demander combien de réunions Zoom viennent de se terminer en queue de poisson – mais pas le temps de rêvasser, il faut faire vite.
Clic. Tu ouvres ton logiciel; zoom sur le secteur nord-est, état des lieux en direct. Il faut s’assurer que les batteries de secours prennent bien le relais. Tout a l’air de bien fonctionner. Clic. Un coup d’œil sur l’état de chaque batterie: celle-ci se porte bien, celle-là aussi – oh, quelque chose cloche avec la no 6706. Deux-trois clics: ok, c’est réparable à distance.
En deux minutes, c’est réglé. À ta fenêtre, la tempête rage toujours. Tu as une pensée furtive pour tes jeunes années d’électricien et ces heures de réparations tortueuses sous les pires déluges.
« Ça marche ! » que ça crie plus loin dans le bureau.
Une gorgée de café, un petit soupir satisfait: « merci la technologie ! ».
Autonom et le futur des batteries
Celui que tu remercies à ce moment-là, c’est Hugues Marceau.
C’est grâce à la batterie intelligente que lui et son entreprise Autonom ont conçue que les réseaux de télécommunications peuvent maintenant aisément prévenir les pannes. Un coup de pouce critique pour les transactions bancaires, les appels d’urgence ou les communications virtuelles. Ou pour les cuistots qui veulent simplement terminer leur fabuleuse recette de poulet chasseur (« comment je suis censé faire sans les instructions de Ricardo? »). En somme, c’est grâce à la technologie développée par Autonom qu’il est possible de se soustraire aux aléas d’un réseau instable et de défier les pannes. Utile dans un monde de plus en plus connecté? À qui le dis-tu.
L’histoire d’Autonom, elle débute quand Hugues Marceau, diplômé de Polytechnique Montréal et passionné de batteries et d’électricité, fait le constat d’un problème important dans le monde des télécommunications. Pour pallier des pannes éventuelles, tous les réseaux sont munis de batteries de secours qui permettent de maintenir l’alimentation électrique si elle vient à manquer. Or, ces batteries ne sont pas infaillibles: utilisant une technologie au plomb, elles ont une durée de vie limitée et cessent parfois de fonctionner de manière inopinée. Il faut les tester et les remplacer fréquemment, ce qui engendre des coûts et des maux de tête aux gestionnaires qui préfèrent souvent attendre les plaintes des clients avant d’agir. Hugues y voit un défi intéressant à relever. Avec des collègues de Polytechnique, il se lance dans une série de tests, de rencontres et élabore un premier prototype: une batterie faite à partir de lithium – un matériau plus durable et moins polluant. La nouvelle batterie attire immédiatement l’attention. Un premier contrat est établi avec un fournisseur de télécommunications en Inde et voilà qu’Autonom écoule environ 6000 batteries par mois. Mais Hugues veut aller encore plus loin.
Une batterie intelligente
Ce que le jeune entrepreneur a en tête, c’est une batterie intelligente, connectée à internet, capable de s’évaluer et même de se réparer toute seule à distance. En somme, une solution tout-en-un capable d’assurer une fiabilité à toute épreuve aux fournisseurs de télécommunications. L’idée est d’autant plus nécessaire que le passage à la technologie 5G pose son lot de problèmes: avec la multiplication de petites antennes disséminées un peu partout, il devient de plus en plus ardu d’intervenir directement sur le terrain. La batterie d’Autonom apparaît comme une solution toute désignée. Ne reste plus qu’à la faire rayonner.
Rendre Autonom… autonome
Monter un projet entrepreneurial de A à Z n’est pas une mince affaire. Pour construire son entreprise, Hugues réalise bien vite qu’il lui faudra s’appuyer sur tout un réseau d’organismes prêts à l’accompagner dans son projet. Du Centre d’entrepreneuriat Poly-Udem, au prix Adopte Inc., à la Fondation Montréal inc., en passant par une bourse PME MTL, Hugues profite d’une bonne poussée qui l’aide à structurer les bases de sa startup. Un passage à Fredericton pour profiter du programme Energia Ventures, spécialisé en énergies vertes, un dernier élan d’accélération prodigué par le Centre d’innovation District 3 et, encadré par ce dernier, Hugues est prêt pour sa dernière ligne droite avec le service PMEit de MAIN.
Au programme pour l’équipe d’Autonom: parachever le développement de leur nouvelle batterie, parfaire leurs connaissances en propriété intellectuelle et perfectionner leurs techniques de commercialisation. Le projet est ambitieux, les objectifs sont clairs et les outils, à disposition. Grâce au PMEit, l’équipe d’Autonom a accès à une enveloppe d’une valeur de 50 000$ et un important réseau de coachs et de mentors pour répondre à leurs questions et orienter leurs actions.
« Ça a vraiment aidé: le PMEit nous a permis de faire en six mois ce qui nous aurait normalement pris un an à faire. En termes de financement particulièrement, ça a été déterminant, parce qu’on était un peu un mouton noir, on allait pas nécessairement dans le sens des tendances recherchées par les investisseurs. Le soutien que MAIN nous a accordé, ça nous a permis de réellement éclore. »
« On est très reconnaissants de cet appui. C’est vraiment ça qui va nous permettre de continuer notre mission et d’étendre notre impact. »
Depuis le PMEit, Autonom est sur une belle lancée. Le développement de leur batterie intelligente va bon train et devrait bientôt alimenter une antenne de télécom près de chez vous.
Les amateurs de réunions Zoom et de poulet chasseur peuvent dormir tranquilles.