En pleine ascension, la météo peut changer rapidement, surtout si près du sommet. Est-ce que l’imprévisibilité des conditions climatiques va arrêter notre progression? Devant l’incertitude, la tentation est forte de rester bras croisés et d’attendre de voir se répéter la même journée le lendemain. Au contraire, c’est le moment de se serrer les coudes, et de confronter les risques ensemble.
C’est cet esprit qui a animé la quatrième journée du Sommet des accélérateurs dont l’objectif général était de chercher des réponses. Avant même de revenir chronologiquement sur ce qui a été discuté, la conclusion semblait claire, en fin de journée, sur l’atteinte de cet objectif. Toutes les organisations avaient véritablement trouvé des réponses aux questions posées tout au long de la journée, mais n’avaient pas nécessairement trouvé la seule réponse pour déterminer leur ambition pour les prochaines années ainsi que l’ambition de l’écosystème startup québécois. Et c’est tant mieux. L’inverse nous aurait grandement surpris.
Les premières réponses sur l’accompagnement souhaité par les entrepreneur.e.s sont venues de Céline Juppeau (Kotmo) qui, revenant sur son parcours dans l’écosystème, a adressé un point central de l’écart entre les besoins et l’offre d’accompagnement. Selon elle, l’écosystème doit évoluer pour trouver des façons d’outiller les entreprises et exécuter des stratégies plutôt que les coacher ad nauseam. Parce que le temps utilisé à se faire présenter une énième stratégie d’exportation ou autre, c’est du temps où la valeur des entrepreneur.e.s n’est pas utilisée pour vendre son entreprise. Et dans le cas de Céline, qui revenait sur les raisons de lancer le Ciklo, premier stylo recyclé et recyclable fait au Québec, la valeur qu’elle voit à son entreprise est de la maintenir au Québec le plus longtemps possible.
La matinée s’est poursuivie avec une formule « débat d’Oxford » sur des sujets clivants, mais importants pour créer de l’espace pour un vrai dialogue. On va se le dire; au Québec, nous avons tendance à chercher le consensus rapidement lors de conversations difficiles. Or, pour dénouer les multiples impasses qui se dressent à l’horizon de notre escalade, nous devons sortir du statu quo qui nous pousse vers l’accommodement. Sans ressortir tous les arguments des neuf débats qu’ont animés les participant.e.s du Sommet, nous avons vu émerger des positions centrales vers lesquelles la plupart se disaient confortables à converger, sans pour autant ignorer les divergences.
Après un lunch riche en décibels (la flamme du débat était vive!), la discussion en trois segments animée par Marine Thomas (Les Affaires) était destinée à donner des prédictions météo pour la fin du parcours, mais aussi sur les ascensions des prochaines années pour l’écosystème. Le premier bloc avait un regard vers le passé avec six têtes d’affiche qui ont mis sur pied des initiatives, encore actives, au cours de la dernière décennie. Celles-ci ont débuté comme certaines startups à succès qui commencent bootstrappées et agiles avant de croître rapidement à force d’avoir pris certains risques. Comme l’a dit Phil Telio, ces initiatives écosystémiques étaient des big ideas that started out with a no, mais qui étaient importantes pour réunir les membres de la communauté startup.
Le deuxième bloc a abordé les difficultés de faire des affaires au Québec dans un contexte macroéconomique, surtout avec un vent de face, grâce aux connaissances fines de Charles Milliard (Fédération des chambres de commerce du Québec). L’une des façons de faire face aux multiples défis qui nous affligent, selon Charles, c’est de maintenir les échanges entre humains, qui sont au cœur de la façon dont le commerce s’effectue depuis des millénaires.
Enfin, le troisième bloc était axé vers l’avenir avec une réflexion sur des problèmes et des besoins clés en entrepreneuriat grâce à la verve de Dominic Gagnon (Connect&GO). Si vous êtes un.e avide lecteur.trice de sa tribune dans Les Affaires, vous savez comment Dominic ne lésine pas avec des demi-vérités. L’un des sujets les plus porteurs était sur le bien-être des entrepreneur.e.s. Selon lui, les fonds en capital de risque devraient s’assurer du bien-être mental de leurs entreprises en portefeuille parce que c’est une bonne façon de s’assurer d’un bon retour sur investissement. En anglais, on appelle ça un no-brainer. Et c’est pas mal le point d’orgue de cette discussion d’après-midi: s’assurer de répondre aux vrais problèmes de notre société et d’avoir des organismes qui aident ces personnes porteuses de solutions.
Pour terminer cette longue journée d’ascension, nous avons reçu Paul Ortchanian (Bain Public) pour un atelier sur la définition des grands objectifs ambitieux ou Big Hairy Audacious Goals (BHAG). Une façon de s’aider comme écosystème et d’aider les participant.e.s au Sommet à anticiper les grandes tendances. L’idée était simple: traduire les ambitions de chaque organisation en un court résumé que pourrait comprendre un enfant de 8 ans. Le travail requis par chacun restait difficile puisqu’il nécessitait de remettre en question chaque mot sur leur existence dans une phrase simple.
C’est l’exercice de notre vie que de traduire nos ambitions simplement. Après tout, l’écosystème d’accompagnement vit dans un environnement compétitif et difficile avec des messages ambigus. Clarifier nos rôles, d’abord individuel comme organisation, ensuite collectif comme écosystème, y va de notre propre existence dans un rôle de soutien aux startups. Louis-Félix Binette (MAIN) a fermé la journée du jeudi avec l’idée que c’est notre action collective qui fait la différence. Il y a véritablement un impact négatif à sous-collaborer. Donc, continuons de nous parler pour vrai. Sans quoi nous sommes voués à jouer constamment dans un film et à revivre les mêmes erreurs, comme Bill Murray, en ce « Jour de la Marmotte ».
P.S. L’image qui accompagne ce billet est l’oeuvre de Thibault Bloyet (Propolys). Merci pour cet croquis qui représente très bien l’impulsion de la journée!
P.P.S. Les prédictions des marmottes sur le printemps n’augurent pas bien.
— Guillaume Lajoie, responsable — communications et affaires publiques @ MAIN