À quoi s’attendre du nouveau gouvernement de Mark Carney?
Publié le 22 mai 2025
Un nouveau gouvernement fédéral, mené par le premier ministre Mark Carney, s’installe assez rapidement à Ottawa depuis les élections du 28 avril dernier. Récemment, les ministres qui s’occuperont de certains dossiers clés ont également été assermentés, et les travaux parlementaires débuteront d’ici la fin du mois.
Analysant les engagements de la campagne et les premières nominations ministérielles, que peut-on concrètement attendre de ce gouvernement en matière d’entrepreneuriat innovant?
Des promesses ambitieuses qui restent à concrétiser
Outre une baisse d’impôt promise, et annoncée, le Parti libéral du Canada de Mark Carney a promis de relancer l’économie canadienne en s’appuyant sur l’investissement privé, la stimulation du commerce intérieur, la décarbonation, et l’innovation.
Parmi les mesures phares qui faisait partie de son plan Un Canada Fort, notons un appui renforcé à la recherche et au développement (jusqu’à 6 M$ par projet via le crédit d’impôt RS&DE), la création d’un crédit d’impôt pour l’adoption de l’IA dans les PME (400 M$), et un soutien accru au capital de risque (1 G$ via l’Initiative de catalyse du capital de risque).
Pour faciliter l’exportation des entreprises, une nécessité en ces temps de turbulence économique, le gouvernement prévoit injecter 80 M$ dans le programme CanExport et créer un Fonds de réponse stratégique de 2 G$ pour atténuer les effets des barrières commerciales. Une enveloppe de 5 G$ est également prévue pour renforcer le commerce interprovincial, notamment via des projets logistiques et d’infrastructure.
Les autres secteurs ne sont pas en reste : 25 G$ seront investis dans la construction de logements préfabriqués, 1,5 G$ dans les chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques et projets d’énergie propre, sans oublier des incitatifs à l’embauche d’apprentis et le soutien à la modernisation du secteur bioalimentaire.
Ces annonces promettent un souffle nouveau pour les entreprises innovantes, mais leur mise en œuvre sera cruciale pour en mesurer les effets concrets.
Un cabinet réorganisé autour de l’innovation
L’une des façons de s’assurer d’une mise en œuvre efficace de ce plan ambitieux est de s’entourer d’un cabinet performant. L’une des décisions les plus stratégiques du nouveau gouvernement réside dans le découpage des portefeuilles économiques : l’innovation et l’industrie sont désormais confiées à deux ministres distincts.
Le premier ministre Carney a annoncé un cabinet ministériel à deux vitesses, soit avec 28 ministres détenant des portefeuilles bien combles, et 10 secrétaires d’État qui s’occupent de dossiers spécifiques.
Les deux nominations les plus importantes sont:
- Mélanie Joly est nommée ministre de l’Industrie et ministre responsable de Développement économique Canada pour les régions du Québec. Cette nomination, qui n’est nullement une démotion, est un signe d’un renforcement politique de ce portefeuille, avec pour mandat d’ancrer la croissance dans les secteurs stratégiques et de faciliter le dialogue entre État et entreprises.
- Evan Solomon, ex-journaliste économique, prend la tête du Ministre de l’Intelligence artificielle et de l’Innovation numérique, à l’intersection des technologies émergentes, de l’IA et de la recherche.
Bien entendu, d’autres nominations – telles que François-Philippe Champagne aux Finances, Anita Anand aux Affaires étrangères et Steven Guilbeault au ministère de la Culture, des Langues Officielles et de l’Identité Canadienne, ainsi que Lieutenant du Québec — sont d’importance pour l’économie de l’innovation.
L’on sent surtout que les nominations du gouvernement libéral de Mark Carney visent à relancer des dossiers structurels comme le commerce interprovincial et les chaînes d’approvisionnement, tout en outillant les ministres de profils complémentaires. La nouvelle structure ministérielle suggère une volonté de moderniser la machine fédérale en matière d’innovation, mais aussi de mieux intégrer les priorités économiques aux réalités technologiques du moment.
Un Parlement en veille, l’économie de l’innovation sur le qui-vive
Si l’exécutif s’est mis en place rapidement, les travaux parlementaires débuteront le 27 mai prochain, ce qui freine le déploiement des promesses électorales. De plus, la livraison retardée d’un budget à l’automne rend difficile d’anticiper la livraison des grandes actions du gouvernement.
Dans un contexte de ralentissement économique, d’instabilité commerciale mondiale et de pressions sur la productivité canadienne, les milieux de l’innovation attendent des gestes concrets.
Pour les entreprises innovantes, trois signaux seront particulièrement scrutés :
- La rapidité de déploiement des nouveaux crédits d’impôt et des fonds annoncés. L’expérience passée a démontré que l’annonce de mesures n’implique pas leur disponibilité immédiate. Les entreprises veulent des programmes accessibles, simples et opérationnels d’ici la rentrée.
- La capacité de coordination intergouvernementale, notamment sur le commerce interprovincial. Plusieurs des mesures annoncées exigent une collaboration étroite avec les provinces — un défi politique autant que logistique.
- L’ouverture au dialogue avec les écosystèmes régionaux. Si les grands fonds sont centralisés, leur efficacité dépendra de relais locaux forts, de partenariats publics-privés et de mécanismes de concertation adaptés aux réalités du terrain.
En somme, les attentes sont élevées, mais teintées de prudence. Le gouvernement Carney dispose d’un capital politique fort, malgré un gouvernement minoritaire, et devra prouver rapidement sa capacité à livrer des résultats pour regagner la confiance des milieux d’affaires, particulièrement dans les secteurs qui innovent malgré les incertitudes.
Pour en savoir plus sur certaines demandes en matière d’entrepreneuriat:
- Plateforme électorale fédérale 2025 de la FCCQ : 8 grandes priorités
- 5 demandes de la relève d’affaires au nouveau premier ministre du Canada par le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec dans Les Affaires.
Soyez aux premières lignes pour parler des enjeux de l’entrepreneuriat innovant
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