donner une voix à la moitié de l’humanité

​​« il y a plus de personnes qui s’appellent Paul que de femmes sur ce panel ». un commentaire soulevé par un collègue à main sur une de nos chaînes Sack en février dernier.

depuis, les exemples d’événements, de panels, d’annonces médiatisées, où les femmes sont nettement sous-représentées, carrément absentes, ou ajoutées en « photo op » in extremis, se multiplient. « and when you see it, you can’t unsee it ». et ça démange.

pourtant, la nécessité d’avoir plus de femmes mises de l’avant est une réflexion qui n’a rien de nouveau à main; j’ai souvent vu notre DG louis-félix refuser une invitation à interagir sur un événement, pour ne pas être « le énième homme sur la scène. »

le constat est aberrant: il y a encore un manque consternant de femmes qui s’expriment sur la place publique.

on ne parle pas ici de promouvoir les femmes qui travaillent dans votre entreprise. comme le dit une amie, « nous formons 50% de la population; le simple fait qu’on occupe la moitié de la place dans les milieux du travail, c’est le strict minimum ».

on parle ici d’entendre la voix des femmes, de mettre des femmes de l’avant, celles qui, naturellement, ne se mettront pas de l’avant d’elles-même. fait intéressant: dans la construction de la programmation du sommet des accélérateurs l’an passé, j’ai fait un appel à tous.tes de me contacter pour proposer des interventions. parmi les brillantes personnes qui se sont proposées d’elles-mêmes, 0% étaient des femmes.

en consultant les réseaux sociaux, il m’arrive souvent de voir passer la promotion d’un événement avec plein de femmes comme têtes d’affiche, et de me dire « tiens, c’est rafraîchissant de voir autant de femmes sur un panel ». pour finalement réaliser que c’est un contenu qui parle de « femmes en tech » ou « femmes en sciences.».

faites-en, des panels sur les femmes en tech, des événements « au féminin », on a besoin de solutions pensées par et pour la moitié de la population. mais, de grâce, accordez cette même importance de représentativité à l’ensemble de vos événements, pas seulement à un segment périphérique hors des heures de grande écoute.

LES DONNÉES SONT LÀ

mettre les femmes de l’avant, sur un panel, dans la programmation, à la tête des entreprises, ce n’est pas simplement pour le fait d’être équitable. comme l’écrit caroline criado perez dans invisible women: data bias in a world designed for men, « lorsque nous excluons la moitié de l’humanité de la production de connaissances, nous perdons des idées potentiellement transformatrices ».

elle cite l’exemple du siège social de google en californie, qui n’avait jamais pensé à mettre des stationnements pour femmes enceintes jusqu’à ce qu’une de ses directrices porte un enfant et réalise que c’est beaucoup plus difficile de marcher longtemps quand on est enceinte de 8 mois. ça ne coûtait rien à google d’ajouter des stationnements dédiés pour personnes enceintes. il fallait juste une personne avec un utérus dans un poste de direction pour y penser.

CE N’EST VRAIMENT PAS TOUT NOIR

heureusement, nous sommes entourés d’organisations, soutenues par des personnes exemplaires, qui ont à cœur la représentativité. pour n’en citer que quelques-unes:

  • l’équipe de startupfest, avec qui nous travaillons à mettre en place le acceleratorfest, est un garde-fou inébranlable en matière de diversité.
  • l’initiative femmes expertes permet de proposer et chercher, comme son nom l’indique, des femmes expertes pour interagir dans divers domaines.
  • le manifeste des femmes en tech proposait déjà superbement, il y a quelques années, un manifeste pour « la parité dans les événements technologiques, pour lutter contre la sous-représentation des femmes dans l’industrie ».
  • le réseau des femmes d’affaires du québec soutien et propulse les québécoises;
  • le gouvernement du canada offre un guide pour la planification d’événements inclusifs;
  • et bien sûr, l’organisation urelles, lancée par chloé freslon, accompagne les entreprises en matière d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI).

NOTRE BOUT DE (CHE)MAIN

on a encore du chemin à faire, en tant qu’organisation, et nous demeurons entendeurs et entendrices de propositions.

dans ses actions courantes, main applique les principes de parité de genre dans les nominations au sein de sa haute direction et son conseil d’administration. en plus d’avoir davantage de membres féminins, le conseil d’administration de main est composé de personnes compétentes, engagées dans l’écosystème d’accompagnement, issues de profils diversifiés et dont plusieurs s’identifient comme personnes racisées.

main a aussi inclus dans ses processus internes une vigie des salaires effectuée par une firme externe pour s’assurer de l’équité homme/femme et éviter toute forme de discrimination possible dans les processus d’embauche.

FAIRE MIEUX

ce n’est pas simple, de crever un abcès publiquement.

si j’ai la motivation et la tribune pour écrire ces lignes, c’est aussi beaucoup parce que je suis entourée d’hommes d’exception qui sont autant, voire plus sensibles que moi, à la question de représentativité des femmes. parmi eux, il y a notamment mon « boss », louis-félix, mon collègue, guillaume, et mon amoureux, adrien.

je comprends aussi ce que ça implique pour mon rôle en création de moments de rencontres pour l’écosystème startup québécois. je suis personnellement coupable d’avoir tenu des événements qui manquaient franchement de diversité. je sais ce que c’est de vouloir boucler sa programmation pour la communiquer dès que possible à celles et ceux qui se déplaceront, qui paieront de leur argent ou de leur temps, et qui choisiront de venir entendre notre proposition événementielle, plutôt que de faire autre chose d’important. on veut livrer et on veut cocher des éléments sur sa to do.

éventuellement, je sais que je me retrouverai à minuit moins une avant un événement, et que des annulations me mettront devant l’éventualité d’avoir un événement sans mixité. j’aurai à prendre des raccourcis. mais c’est justement là qu’il faudra redoubler d’efforts, être créatif, ne pas tomber dans le panneau.

je m’engage à faire tout ce qu’il est en mon pouvoir pour ne pas qu’on ait à se priver, comme le dit caroline criado perez, de la production de connaissance par la moitié de l’humanité.

— joyce mclean, responsable — sommet et relations avec la communauté @ main